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Isabelle Autissier - Au-delà des mers

Quand on évoque son nom, trois mots s’imposent comme une évidence : courage, audace, engagement.

Il faut bien ces trois qualités pour avoir affronté toutes les tempêtes et, après avoir mené ses bateaux à bon port, continuer de se battre pour éveiller les consciences aux périls qui menacent notre planète. Isabelle Autissier mène ses combats sans leur attribuer un mérite particulier du fait qu’elle est une femme qui s’est imposée dans un milieu essentiellement masculin, elle refuse toute limite qu’on voudrait imposer à son sexe.

« Je ne me suis jamais posée de question en tant que femme, j’ai toujours raisonné en tant qu’être humain, et je me suis efforcée de faire ce que j’avais envie de faire ».

Elle vit à La Rochelle mais continue de parcourir la terre et les océans. Comment empêcher de lever l’ancre celle qui fut la première navigatrice à accomplir un tour du monde en solitaire ?

BOC Challenge, Vendée Globe, Mini-Transat, Solitaire du Figaro et bien d’autres courses ne furent jamais des longs fleuves tranquilles. Son monocoque de 60 pieds Ecureuil Poitou-Charente démâte et est détruit par une vague au large de l’Australie, un autre bateau construit avec le soutien de l’entreprise vendéenne PRB affrontera des conditions extrêmes et sera couché à plusieurs reprises. Rien n’a pu atteindre sa détermination à aller jusqu’au bout. La vie d’Isabelle Autissier se lit comme un roman d’aventures.

Comment devient-on navigatrice ? Une vocation liée à un goût pour les voyages extrêmes qu’elle doit à Alexandra David-Néel dont elle dévorait les récits lorsqu’elle était gosse. Et à son admiration pour Bernard Moitssier et Gérard Janichon qui défiaient les quarantièmes rugissants. Elle doit aussi son indépendance d’esprit à ses parents qui ont élevé leurs cinq filles en leur laissant la liberté de décider elles-mêmes leur avenir sans les barrières du masculin et du féminin. La petite Parisienne grandit à Saint-Maur-des-Faussés et découvre le grand large dès l’âge de 6 ans lors de ses vacances en Bretagne. Petit dériveur pour sillonner la baie de Saint Malo, puis un bateau à cabine pour pousser en famille jusqu’aux îles de la Manche.

La voici basée à La Rochelle depuis le début des années 80. Ingénieur agronome spécialisée en halieutique, ses recherches sur les langoustines et les gros crustacés l’ont donc amenée en Charente-Maritime. « Au début, j’avais un boulot à l’Institut des pêches, puis j’ai enseigné à l’Ecole maritime et aquacole. J’ai choisi de rester vivre ici car c’est un endroit agréable où je peux fabriquer mes bateaux et aller partout à vélo ! ».

Coucher de soleil Pont d'Oléron © Huîtres Charente-Maritime

Isabelle Autissier peut affronter tous les dangers mais n’aime pas se compliquer inutilement la vie.

« Officiellement, je suis à la retraite, mais je continue de faire des conférences, d’écrire des bouquins, de m’investir pour WWF France dont je suis Présidente honoraire. S’il n’y avait pas d’organisations environnementales, il n’y aurait pas de prise de conscience aussi forte sur les dangers du changement climatique. Je ne suis ni pessimiste, ni optimiste, on n’en est plus là, la situation est gravissime et il faut se battre ensemble pour éviter le désastre ».

Elle n’a pas besoin d’aller au bout du monde pour faire ce constat. « L’élévation du niveau de la mer est perceptible ici, on est obligé d’investir des millions d’euros pour construire une digue autour de la ville devenue vulnérable. Et même dans mon jardin, les abeilles, les guêpes et les papillons ont disparu ».

Quand elle n’est pas en Islande pour naviguer dans les mers qu’elle préfère froides, elle se balade à pied sous les arcades, s’installe sur le port pour regarder les tours prises dans la brume. « Mais je suis toujours en mouvement. L’inactivité n’est pas pour moi un concept familier ». Elle est heureuse que sa notorité ait aidé à combattre l’idée qu’il puisse y avoir des domaines réservés aux hommes. La médiatisation lui a permis de trouver des sponsors, mais elle a toujours su séparer le personnage public de la personne privée. « Aucune photo de ma famille publiée dans la presse, ma vie privée reste privée, je ne vois pas ce que cela pourrait apporter aux gens de connaître la couleur de ma cuisine et ce que j’aime manger ! »

Ses exploits parlent effectivement pour elle.

 

Sport nautique & rue des arcades © Francis Giraudon - Office de tourisme La Rochelle 

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Recueilli par Régine Magné